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Vivre la communion spirituelle

L’épidémie de COVID-19 empêche la célébration des messes à l’église. C’est une souffrance pour tous les chrétiens d’être ainsi privés de l’eucharistie, mais aussi de ne pouvoir nous rassembler en communauté le dimanche ou en semaine pour vivre ce que nous sommes appelés à devenir au sein de l’Église : le corps du Christ.

Nous laisser rejoindre par le Christ

Il est important dans ce contexte de cultiver les autres lieux qui entretiennent notre communion au Seigneur et entre nous. Comme le souligne un récent article du Service National Pastorale Liturgique et Sacramentelle, nous voici invités à nous laisser rejoindre par le Christ par les autres moyens que l’Église nous donne et dont elle affirme que par eux le Christ se rend présent à nous : « Il est là présent dans sa parole, car c’est lui qui nous parle tandis qu’on lit dans l’Église les Saintes Écritures. Il est là présent lorsque l’Église prie et chante les psaumes… » (SC 7)

Même isolés par les circonstances, nous pouvons vivre la communion avec nos frères et avec le Seigneur, dans la méditation de sa Parole. Il est présent, aussi, avec nous lorsque nous célébrons la liturgie des Heures et que, ce faisant, comme durant la messe, nous prions « pour la gloire de Dieu et le salut du monde ». Dès lors, nous sommes en communion spirituelle les uns avec les autres, rassemblés par le Christ qui fait de nous son corps.

Seul ou en famille, en prenant un temps de lectio divina à partir des lectures de la messe, en priant la liturgie des Heures, nous sanctifions le jour du Seigneur en nous laissant sanctifier par le Christ qui nous unit à lui dans son offrande et sa prière.

Le Seigneur peut donner sa grâce en dehors de la réception des sacrements

Bien sûr, l’Eucharistie demeure « la source et le sommet de toute la vie chrétienne » (LG 11). À ce titre, elle est irremplaçable et il est important de pouvoir nous y unir en temps réel, même à distance, par les moyens modernes qui sont à notre disposition. Et s’il ne nous est pas possible de communier sacramentellement, nous pouvons cependant vivre une authentique communion spirituelle avec le Seigneur au cours de la messe, comme le rappelait saint François de Sales :

Quand vous ne pourrez pas avoir ce bien de communier réellement à la sainte messe, communiez au moins de cœur et d’esprit, vous unissant par un ardent désir à cette chair vivifiante du Sauveur. (Introduction à la vie dévote, II, 21)

Si le Seigneur a voulu lier sa grâce aux sacrements, il n’est pas pour autant lié par ses sacrements : Il peut aussi donner sa grâce en dehors de la réception des sacrements. (Cf. CEC 1257) L’Église définit ainsi la communion spirituelle comme une

« communion au Christ présent dans l’Eucharistie, non pas en le recevant sacramentellement, mais par le seul désir procédant d’une foi animée par la charité. La valeur de la communion spirituelle repose sur la foi en la présence du Christ dans l’Eucharistie comme source de vie, d’amour et d’unité. Elle est un moyen privilégié de s’unir au Christ pour ceux qui ne peuvent pas communier corporellement. »

Acte de communion spirituelle

Un acte de communion spirituelle composé par Mgr Centène, évêque de Vannes, pourra aider chacun à entrer dans cette communion qui nous unit au Christ ainsi qu’à tous ceux qui, régulièrement, sont privés de l’Eucharistie.

Rappelons, pour finir, que le confinement ne nous coupe pas les uns des autres et que nous sommes appelés à demeurer unis dans la foi, l’espérance et la charité. Que ces vertus que l’Esprit infuse en nous puissent se vivre plus intensément dans nos familles. Ces temps sont propices pour que chaque famille puisse grandir dans sa vocation d’Église domestique. C’est peut-être là que se joue la fécondité de l’épreuve que nous traversons.

Prière du pape François pour faire une « communion spirituelle »

« A tes pieds, O mon Jésus, je me prosterne

et je t’offre le repentir de mon cœur contrit

qui s’abîme dans son néant et dans Ta sainte présence.

Je t’adore dans le Saint-Sacrement de ton amour,

désireux de te recevoir dans la pauvre demeure que t’offre mon cœur.

En attente du bonheur de la communion sacramentelle,

je veux te posséder en esprit.

Viens à moi, O mon Jésus, pour que je vienne à Toi.

Que ton amour enflamme tout mon être,

pour la vie et pour la mort.

Je crois en toi, j’espère en toi, je t’aime.

Ainsi soit-il. »

La Confession de désir

Le pape François, dans son homélie du jour à la résidence Sainte-Marthe – 20 mars 2020 –, a évoqué la confession de désir quand il était impossible d’avoir recours au sacrement. À l’approche de Pâques et dans les circonstances actuelles, la question est évidemment réelle. Elle est déjà posée pour les personnes hospitalisées que les pasteurs ne peuvent matériellement rejoindre. Voici quelques points qui aideront à la réflexion des fidèles.

La veille de ce 20 mars 2020, la Pénitencerie Apostolique publiait précisément une « Note de la Pénitencerie Apostolique sur le sacrement de la réconciliation à l’occasion de l’épidémie mondiale actuelle ». Ce texte, un peu technique et destiné d’abord aux pasteurs, présente à la fin la situation décrite par le Pape : que faire quand les fidèles ne peuvent se confesser.

La Pénitencerie rappelle que là où les fidèles ne peuvent recevoir l’absolution sacramentelle :

« La contrition parfaite [1], provenant de l’amour de Dieu aimé par-dessus tout, exprimée par une sincère demande de pardon [2] (celle que le pénitent est actuellement capable d’exprimer) et accompagnée du votum confessionis (3), c’est-à-dire la ferme résolution de recourir le plus tôt possible à la confession sacramentelle, obtient le pardon des péchés, même mortels (cf. Catéchisme de l’Église catholique n° 1452). »

 Ainsi, trois conditions sont requises pour que cette confession de désir puisse être source de grâce :
La contrition parfaite, c’est-à-dire le regret total de son péché ;
La sincère demande de pardon, c’est-à-dire l’ouverture totale à la miséricorde de Dieu ;
La ferme résolution de recourir le plus tôt possible à la confession sacramentelle, c’est-à-dire la reconnaissance que Dieu a donné le pouvoir à l’Église de délier le pécheur de ses fautes. Cette ferme résolution est un votum, un vœu, qui engage totalement aussi.

Il faut donc prévoir que beaucoup de fidèles se confesseront une fois les sacrements de nouveau accessibles.

Une juste considération de la miséricorde de Dieu

En l’absence de confession et d’Eucharistie, le fidèle peut se sentir perdu : comment avoir recours à la grâce donnée par les sacrements ?

La parole de Thérèse de l’Enfant-Jésus « Tout est grâce ». Cette parole est riche d’enseignement.
Si cette parole de Thérèse est généralement bien connue, son contexte, lui, l’est moins, or, il est précisément dans une situation similaire à celle actuelle. Celle où Thérèse pourrait ne pas recevoir de sacrement.

Nous sommes le 4 juin 1897. Thérèse est sur son lit d’infirmerie, l’issue de la maladie ne fait pas de doute. Une de ses sœurs lui dit que peut-être elle partira sans être munie des derniers sacrements de l’Église. Voici la réponse de Thérèse, consignée dans le Carnet jaune – cahier où sa sœur reportait les paroles de Thérèse, pour en garder le souvenir, ce qui sera édité sous le titre Les derniers entretiens :

Si vous me trouviez morte un matin? N’ayez pas de peine: c’est que Papa le bon Dieu serait venu tout simplement me chercher. Sans doute, c’est une grande grâce de recevoir les Sacrements ; mais quand le bon Dieu ne le permet pas, c’est bien quand même, tout est grâce. 

Il y a là un équilibre parfait : désir total du sacrement de l’Église, et abandon total à la grâce de Dieu. On peut ajouter à ce texte les toutes dernières lignes de l’Histoire d’une âme, qui ne laissent pas de doute sur la confiance de Thérèse, « docteur de l’amour miséricordieux » :

« Oui je le sens, quand même j’aurais sur la conscience tous les péchés qui se peuvent commettre, j’irais le cœur brisé de repentir me jeter dans les bras de Jésus, car je sais combien Il chérit l’enfant prodigue qui revient à Lui. Ce n’est pas parce que Le bon Dieu, dans sa prévenante miséricorde, a préservé mon âme du péché mortel que je m’élève à Lui par la confiance et l’amour. » 

Le soutien de la Parole de Dieu

En exil à Babylone, privé de la liturgie du Temple, le peuple hébreu a trouvé dans la Parole de Dieu un puissant soutien. Cette démarche de confession de désir pourrait, à mon sens, être soutenue par trois textes (d’autres sont bien sûr possibles : la prière de Salomon en 1 Rois 8). La Pénitencerie accorde l’indulgence plénière aux fidèles qui font une lectio divina d’une demi-heure, comme également la récitation pieuse d’un Rosaire, d’un chemin de croix…. On fera cette lecture devant un crucifix :

Le psaume 50 :
« Le sacrifice qui plaît à Dieu, c’est un esprit brisé ; tu ne repousses pas, ô mon Dieu, un cœur brisé et broyé. »

La parabole du publicain dans Luc 18 :
« Le publicain, lui, se tenait à distance et n’osait même pas lever les yeux vers le ciel ; mais il se frappait la poitrine, en disant : “Mon Dieu, montre-toi favorable au pécheur que je suis !” Je vous le déclare : quand ce dernier redescendit dans sa maison, c’est lui qui était devenu un homme juste, plutôt que l’autre. Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »

La confiance de Paul dans Romains 8 :
« Dieu est celui qui rend juste : alors, qui pourra condamner ? Le Christ Jésus est mort ; bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu, il intercède pour nous : alors, qui pourra nous séparer de l’amour du Christ ? la détresse ? l’angoisse ? la persécution ? la faim ? le dénuement ? le danger ? le glaive ? » 

Il est bien sûr à espérer que la situation actuelle ne durera pas, et nos prières ne doivent pas faiblir. Que notre espoir en Dieu lui-même reste intact. Il est avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde (cf. Matthieu 28, 20).